We’ve updated our Terms of Use to reflect our new entity name and address. You can review the changes here.
We’ve updated our Terms of Use. You can review the changes here.

Le ciel

from Immobile by Francis Rossignol

/
  • Streaming + Download

    Includes unlimited streaming via the free Bandcamp app, plus high-quality download in MP3, FLAC and more.
    Purchasable with gift card

      $1 CAD  or more

     

lyrics

Chapitre 7 -Le ciel.

La lumière s’éteint rapidement sur l’avant-bras. Progressivement, une femme apparaît langoureusement sur la partie gauche de la scène sur un fox trot. Les clients du café sont silencieux.

La femme est immobile. Elle est vêtue d'une fourrure noire. Une fine pluie musicale plane dans l'espace. Un autre homme entre dans la pièce. Il se tient le bras, il semble blessé. La femme s'avance vers lui, il tend la main vers l'avant, afin de l'empêcher de venir à lui.

Elle dit :

F- Où ?
H- Je suis là !
F- Où étais-tu ?
H- Je suis las !
F- Où étais-tu ?
H- J'étais là où tu ne peux être. Absent.
F- Comment peux-tu me dire ça ! Je t'ai tellement attendu, frappe-moi plutôt, frappe-moi !

Elle pleure, elle se tourne tranquillement en baissant la tête et il la frappe sur le dos d’une claque. Elle dit :

F- J’ai mal, j’ai très mal. Embrasse-moi.

Il l’embrasse dans les cheveux, derrière la tête et elle dit :

F- Je hais attendre.

Noir.

( Les dernières notes d’un orgue se font entendre dans le noir.)
*************************************************************

H- Cette fois-ci…

Il dit cette phrase en enlevant son imperméable noir qui est trempé. Il le jette par terre. Il range avec soin son parapluie et s'assied à la table.

F- De quoi parles-tu ?
H- Je te l'ai toujours dit.

Il prend un temps, il allume un petit cigare et réfléchit, il souffle la fumée en disant :

H- Tu veux savoir ce qui est impossible !
F- Le gris du ciel.

Elle a un petit sourire aux lèvres. Lui, est distrait.

H- Je n'en sais rien….. Qu'est ce qui est impossible ? (Il réfléchit) Tout cela m'est interdit.
F- Est-ce que tu m'entends quand je te parle ?
H- Oui oui, le gris du ciel.
F- Je croyais que tu avais dit qu'il était…
H- J'ai dit le ciel. Tu sais le bruit, là, ici et là !

Ils se mettent à rire…. Ils arrêtent enfin, ils prennent un temps.

H- (imperceptible) On me menace, tu le savais ?
F- Mais de qui parles-tu ?
H- Une menace.
F- Qui ?

L’un devant l’autre, ils se regardent dans les yeux.

F- Ce n'est pas clair, c'est même très obscur. Je t'avertis, parle.
H- Je parle … Je ne fais que cela, parler. (Il hésite. Il se dit à lui-même) Elle m'a cloué, elle ! Je me suis cloué.
F- ……

Il se déplace. Il est maintenant seul devant le public.

Il faisait très chaud cette nuit-là ! Je roulais et roulais sur une route de campagne. Je ne sentais plus la nuit autour. En fait, j'étais absent. Il y avait ces boîtes à l'arrière de la camionnette. La vision morbide de cette cargaison m'arrachait toute envie. Aucun besoin, rien que la vitesse, la route. La lumière des automobiles me guidait comme des phares vers un point inconnu. Je pris une courbe, j'en pris une autre et puis là, droit devant, je vis dans le champ de blé d'Inde, une silhouette blanche. Un corps. En fait, c'était un corps immobile qui était debout. La peur me prit mais je réussis quand même à m'arrêter, à reculer et à me placer devant ce que je croyais être un épouvantail. Je vis une femme, figée comme une sainte dans une niche. Elle me souriait. Je sortis tranquillement de la voiture, je m'avançai vers elle et lui demandai :

M- Tout va bien ici ?
F- Je marchais dans la nuit, et j'ai vu la lune.
M- Vous n'êtes pas perdue au moins.
F- Bien sur que non, je vous attendais tranquillement, ici.
M- Où ? Qu'est ce que vous dites ?
F- Que je suis là. Je suis là car vous y êtes !
M- Je ne vois pas. Où voulez-vous en venir !
F- Je ne veux pas en venir. J'aimerais que vous me reconduisiez où je vis ! Ne vous inquiétez pas, ce n'est pas très loin.

Lorsqu’elle m'a dit cette phrase « Ne vous inquiétez pas, ce n'est pas très loin » j'eus le fort sentiment que je n'avais plus rien à redire. Je sentis profondément qu'il fallait maintenant obéir à cette femme. Elle s'avança d'un pas souple, les voiles au vent. Je lui dis très haut :

M- Oui, je vous emmène. Dois-je vous ouvrir la portière ?

Elle restait là, devant la portière du passager, en regardant le ciel lumineux. Je ne pus m'empêcher de regarder ce visage sans fard qui lui donnait un air de noblesse si beau. Ses yeux noirs, dans une robe parfaitement soignée.

Subitement, elle se retourna vers moi en plantant avec aplomb ses yeux dans les miens. Surpris, je me penchai et ouvris la portière. Elle me dit :

F- Je suis très étonnée que vous soyez venu. Maintenant, vous allez droit devant, Monsieur.
H- Vous pouvez m'appeler Antoine.
F- Vous pouvez m'appeler Anne. Cependant, vous n'allez pas m'appeler. Vous allez seulement me demander et je vais vous répondre, d'accord Antoine ?

Je roulais avec Anne dans la plaine obscure. Nous ne parlions pas, je demandais et récupérais les indications, qu'elle me dictait sèchement. Des informations dites avec un petit sourire aux lèvres. Je me perdais tranquillement dans le réseau tracé par mon silence jusqu'au moment où mes yeux secs se sont fixés sur cette lourde architecture.

H- Vous y êtes, Anne ?
F- Vous allez continuer vers l'arrière. Par-là, sur la route de terre. Voilà, c'est bien Antoine. Garez-vous là… Parfait Antoine.

Elle restait sans bouger dans l'automobile, je n'osais lui parler.

H- Je vous ouvre la portière Anne ?
F-………
H- Je vous ouvre la portière ?

Je sors de la voiture, mes jambes étaient molles. Je me dirigeai rapidement vers la portière avec précaution.

H- Voilà.

Elle baisse la tête et me dit :

F- Je suis lasse. Pourriez-vous me porter à l'intérieur ?
H- Mais …je … je…
F- Vous allez me porter Antoine.

Elle met les pieds au sol. Je me retourne inquiet. Je sens ses mains sur mes épaules. Elle se jette avec aisance sur mon dos, en criant follement :

F- Allez huuuuuue, cheval Antoine huuuue, cheval Antoine, vous êtes mon cheval Antoine.

Ces mots. Ses mots me transperçaient comme des lames. Mes jambes soutenaient mal ce poids qui était pourtant si léger. Elle remuait, me talonnait en criant encore et encore dans la nuit :

F- Huuuuuue, Cheval Antoine ! Huuuuuuuue ! Droit devant !
H- Où ? Mais où allez vous ?

Je galopais. J'avais même la vague impression que je hennissais. Je fonçais, je perdais la tête…..

F- Antoine, Antoine vous me faite mal. ( Elle criait en me mordillant le cou ) Arrêtez ! Mais arrêtez ici !

Je tournais et tournais en rond en imitant le mouvement du carrousel. Quand un cri horrible me transperça l'orteil.

F- Chevaaaal !
H- Oh, excusez-moi, sœur Anne. Je vous arrête ici.
F- (Folle.) Maintenant, vous allez me dire pourquoi vous êtes venu me chercher cette nuit.

credits

from Immobile, track released January 1, 2016
Francis Rossignol : Électroniques, Tables tournantes, texte...

license

all rights reserved

tags

about

Lretlr Montreal, Québec

Le Rossignol et Le Roy est un duo de musiques improvisées.

Lretlr diffuse aussi de la musiques d'ici et d'ailleurs.

Archivistes.

Francis Rossignol Ghislain Roy

contact / help

Contact Lretlr

Streaming and
Download help

Report this track or account

If you like Lretlr, you may also like: